Quatorze

LA RÉALISATION D'UN CADRE MOYEN

Par Kemila Zsange

Shaumbra Magazine, Mai 2023

www.crimsoncircle.com

C'était un autre dimanche matin bien rempli. Mon mental s'était déjà mis en branle alors que je me déplaçais à la maison. C'était une époque où mon partenaire avait appris à ne pas engager de conversation. Il restait dans son espace, me laissait tranquille, jusqu'à ce que je sois prête à annoncer sur le seuil de la porte que j'allais sortir, afin qu'il vienne m'embrasser pour me dire au revoir.

J'avais préparé mon sac à lunch isotherme, trouvé les clés de ma porte, enfilé ma veste et je me suis penchée pour attacher mes lacets. C'est alors que j'ai ressenti une drôle de sensation dans mon estomac. Non, je n'étais pas malade. C'était presque une impression de déjà-vu. Et mon esprit/mental a immédiatement fait le lien entre cette sensation et des scènes d'un film.

Jonathan Kray, au début de Rude Awakening, a répété ces mouvements quatre fois : Il s'est levé au réveil, a mis ses pieds dans ses pantoufles par terre, s'est brossé les dents, s'est habillé et a redressé son badge de « cadre moyen » sur le col de sa veste avant de sortir avec son attaché-case. Cela impliquait un autre jour de marmotte dans le parcours linéaire de l'être humain moderne.

Suis-je en train de vivre un moment Jonathan ?

Ça ne peut pas être. Je suis tellement différente! Presque un peu agacée, mais surtout confuse, j'ai appelé mon partenaire pour lui dire « Je pars maintenant », je l'ai embrassé sans réfléchir et j'ai appuyé sur le bouton de l'ascenseur tandis qu'il fermait lentement la porte derrière moi. J'ai essayé de me débarrasser de cette drôle de sensation. Je suis différente, non pas parce que je porte un sac à bandoulière plutôt qu'une mallette. Je suis différente, non pas parce que je ne porte pas de costume, mais normalement un chemisier décent, confortable et modeste (en tant que thérapeute, je ne veux pas surhabiller mes clients). Je suis différente parce que je travaille pour moi-même. Je ne suis pas un cadre moyen travaillant pour une entreprise avec un patron déraisonnable. Je suis mieux que ça !

Le dimanche, il y a moins de circulation dans le centre-ville de Vancouver. L'air semble plus frais. Les rues sont plus calmes. Je peux me déplacer en marchant plus librement dans les rues de la ville.

Il y a peut-être une petite similitude entre le personnage fictif de Jonathan et moi. Il paraît que nous nous rendons tous les deux à pied à notre bureau. Au cours de mes 20 minutes de marche, heureusement, il il n'y a pas eu de voiture rutilante de retour vers le futur pour rouler à toute vitesse sur moi au milieu de la route, ni mon futur Maître qui en est sorti en se déhanchant et en me secouant la tête. C'est alors qu'une voix cynique s'est fait entendre dans mon esprit: Tu n'as pas un seul patron pour qui travailler, mais aujourd'hui tu n'en as que quatre patrons !

Ces derniers temps, mon mental a appris à se servir de ma vivacité d'esprit contre moi. Que se passe-t-il avec tout ça ? Cela fait-il partie de l'effet post-Croix du Ciel ? Comment puis-je consolider tous les récits habituels, les sentiments et maintenant les nouvelles pensées et les nouveaux sentiments ? Depuis plus de dix ans, j'ai l'habitude de mesurer mon succès en regardant mon calendrier de rendez-vous très chargé.

Il est historiquement prouvé que j'ai été très occupée pendant de nombreuses années consécutives. Sur le calendrier, j'ai l'impression de réussir exceptionnellement bien. Cela a été très important pour quelqu'un qui a eu du mal à croire en elle-même pendant la majeure partie de sa vie. Je fais maintenant ce que j'aime faire. J'ai trouvé ma vocation. C'est épanouissant. Je suis passionnée. Je vis mon but. Et je suis censée être heureuse. J'ai même trouvé une ligne de plaisanterie d'auto-congratulation: « Après ma retraite, je vais hypnotiser les gens. » Cela revient à dire que je ne prendrai jamais ma retraite; ou bien, vous pouvez dire que même si je travaille, je me sens déjà à la retraite. Quelle est la différence? Ne dit-on pas que le travail de l'amour n'est pas du tout du travail ?

Alors, d'où vient cette sensation dans mon estomac ? J'ai décidé d'emprunter de nouveaux sentiers allant vers l'est et le nord, plutôt que l'itinéraire habituel vers mon bureau. J'ai respiré jusqu'à mon estomac pendant que je marchais. Lentement, alors que je mettais un pied devant l'autre, une profonde nostalgie de moi-même a surgi en moi. Elle me disait que je ne pouvais plus continuer à être satisfaite de mes « succès ». J'ai rapidement balayé le paysage actuel de la vie que je menais, et j'ai su que j'avais réussi à devenir un cadre de ma propre «carrière réussie».

Découragée, et en même temps rudement excitée par cette prise de conscience, j'arrivai à l'étage calme de mon bureau. Nous étions le 26 mars 2023, quatre jours après la Croix du Ciel. Et ces quatre jours n'avaient pas été faciles pour moi. Adamus a dit, avant la Croix du Ciel, que si nous ne nous débarrassions pas de tout, de tous les déchets, tous les bagages, toutes les conneries, cela nous ferait très mal.

Quelque chose en moi souffrait discrètement ce dimanche matin. Mon succès théorique n'a pas pu l'apaiser ni y remédier. Depuis plus de dix ans, mon esprit/mental, me racontait les mêmes histoires et contrôlait toutes ces « étapes de la réussite professionnelle », planifiant, travaillant, craignant et calculant. J'ai toujours été consciente de mon esprit calculateur habituel, défié à maintes reprises par la perception de la perte – les opportunités, les finances et le statut - accumulés au cours d'autres vies, et je savais, même si l'esprit/le mental n'était pas entièrement disposé à le reconnaître, que le mental calculateur m'avait gardée petite, ironiquement.

Sur le sol calme de mon bureau - après tout, c'était dimanche - j'ai pris quelques instants en continuant à m'asseoir avec cette sensation dans mon estomac. « Si tu me guides, » « je suis prête à abandonner ce que je pense savoir et à te suivre. » L'aspect toujours présent et persistant que j'appelle « calculateur » en moi a créé pas mal de tension et de souffrance, en essayant de comprendre les choses, de surmonter les problèmes. Mais je peux sentir qu'il y a quelque chose que « calculateur » ne connaît pas - l'ensemble du tableau. Qu'est-ce que c'est? Dis-le-moi. Montre-moi. Mon esprit/mental n'est peut-être pas convaincu, mais pour l'instant, je suis prête à me taire. Je sais que le même vieux succès théorique ne me mènerait pas bien loin. Maintenant, sois mon guide. »

J'ai besoin de toi. Une petite voix calme s'éleva de mon ventre.

C'est tout ? Je pensais vraiment qu'il y aurait une réponse plus « apocalyptique ».

Oui. Vous tous. Laissez tomber les anciennes définitions, y compris la définition du succès, et profitez de la vie. Vous souvenez-vous du soulagement que vous avez ressenti lorsque vous avez entendu Adamus dire que le reste de votre séjour sur cette planète était consacré au plaisir d'être ici ?

Me demandes-tu de moins travailler ?

C'est un autre calcul mental. Il ne s'agit pas de plus ou de moins. Cela va au-delà, ma chère. Et c'est aussi plus simple que cela.

Mon esprit/mental était très confus. Il n'a jamais aimé le mot « simple ». Pendant ce temps, d'étranges larmes me montaient aux yeux. Qu'est-ce que tout cela? Après la Croix du Ciel, des choses étranges vont peut-être se produire. J'ai utilisé des mouchoirs en papier pour essuyer mes larmes avant qu'elles ne t ruinent mon maquillage. Et j'ai respiré un peu plus.

Je vous conseille d'accepter tout ce qui arrive dans l'instant. Adoucissez tous les bords, afin que vous puissiez suivre le flux qui est toujours présent.

Attendez un instant ! Il y a quelques jours, j'ai écrit une ligne sur mes réseaux sociaux : « J'apporte des changements dans ma vie en acceptant le changement qui se produit dans ma vie. »Peut-être que ça vient de toi. Peut-être que tu m'as toujours guidée. Peut-être que je n'ai pas toujours besoin de cette drôle de sensation dans mon estomac pour l'obtenir. Nous verrons.

J'ai sorti les fichiers clients de la journée. Juste au moment où je descendais pour rencontrer le premier client, ma troisième cliente m'a envoyé un message pour dire qu'elle s'était réveillée avec un peu de mal de gorge et une légère toux. Elle voulait reporter le rendez-vous. Mes doigts ont rapidement tapé oui avant d'aller saluer mon premier client.

Entre mon premier et mon deuxième client, j'ai eu le temps d'essayer de déplacer mon dernier client plus tôt pour combler le poste vacant. Il a répondu en disant qu'il souhaitait en fait pouvoir le faire une demi-heure plus tard que le rendez-vous initial. Cela m'a donné l'occasion de proposer de le reporter à une date ultérieure.

Alors me voilà, quelqu'un qui a l'habitude de détester tout changement de rendez-vous de dernière minute, en ce dernier dimanche de mars en particulier, a inopinément terminé son travail beaucoup plus tôt. Je ne savais toujours pas comment catégoriser ce jour particulier, et je m'en fichais. En rentrant chez moi, mal à l'aise et incertaine comme je l'étais, je me suis souvenue à quel point au début de la vingtaine, mon petit ami de l'époque m'avait dit qu'il m'aimait parce que j'avais cet émerveillement enfantin. Il était peut-être temps de profiter à nouveau de ce grand mystère de la vie…

En restant avec ce que je ressentais, sans activité mentale, je me suis tranquillement donné la permission de traverser les cieux.

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AUTEUR

Kemila Zsange

Kemila Zsange a trouvé Crimson Circle exactement au même moment où Adamus s'est présenté, en 2009, l'année où elle a commencé sa pratique d'hypnothérapie. Tout a commencé à avoir du sens. Née et élevée en Chine, elle vit maintenant à Vancouver au Canada. Elle aime réveiller les gens en utilisant la transe. Donc, une hypnotiseuse déguisée, son vrai travail est de défaire l'hypnose avec les gens qu'elle voit d'une manière martiale-artistique. Vous pouvez la trouver sur KemilaHypnosis et CarolsLives.

Interprétation de Feolla 

feolla.ca@gmail.com    www.quatorzenouvelleenergie.com